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  • Rencontre à l’aéroport avec des requérants d’asile

    Rencontre à l’aéroport avec des requérants d’asile

    L’Agora (Aumônerie Genevoise Oecuménique auprès des Requérants d’asile et des Réfugiés) est présente au centre fédéral à l’aéroport de Genève.

    Les personnes arrivant en avion et qui font une demande d’asile sont retenues pour la procédure dans un petit bâtiment dans l’enceinte de l’aéroport. Le temps de la procédure à l’aéroport est limité à 60 jours, si dans ce temps une décision n’est pas prise par le SEM (Secrétariat d’État aux Migrations), la personne entre en Suisse.

    J’y vais à la rencontre des personnes qui ont demandé l’asile, que je ne connais pas et je ne sais pas quelle langue elles parlent. Elles sont souvent angoissées et stressées, quand elles doivent raconter pour leur procédure la raison de leur venue, cela fait remonter des mauvais souvenirs. Je demande alors à Dieu de m’aider a trouver les bons gestes et paroles.

    Quelques rencontres qui m’ont marquée

    L’été passé, un monsieur des Comores est resté 5 mois dans ces lieux. Après la réponse négative de sa demande d’asile, le document nécessaire pour le renvoi a pris un temps énorme avant d’arriver.

    J’ai partagé avec lui le début et la fin du ramadan, son anniversaire et le premier août (Fête nationale suisse). Nous avons eu beaucoup de partages sur les religions, la vie et son avenir.

    Je n’oublierai jamais le sort d’une jeune fille de Guinée ! Avec l’aide de sa mère elle s’est enfuie d’un mariage forcé avec un vieux monsieur. En audition avec le SEM elle a montré la photo du mariage. Dans la réponse du SEM, il était écrit : « qui nous prouve que sur la photo ce n’est pas votre grand père ».

    Elle a reçu une réponse négative de sa demande d’asile. Elle a été renvoyée avec force à Casablanca d’où elle avait pris l’avion. J’ai été en contact avec sa mère, qui n’a plus eu de nouvelle de sa fille.

    J’ai rencontré Emmanuel recroquevillé et apeuré dans un coin. Cela faisait trois jours qu’il était à l’aéroport de Genève, lieu où il a déposé une demande d’asile. Je me présente et lui demande ce qui fait qu’il est dans cet état. Emmanuel me dit : « ici,ils ne veulent pas croire que je suis mineur .»

    Il m’a raconté une partie de ce qu’il a vécu dans son pays et m’a montré les horribles marques de torture qu’il a subies. Dans son pays, le Congo Kinshasa, il était accusé d’être un sorcier. Il se sentait perdu et abandonné. Nous avons partagé et prié ensemble.

    Nous avons pris contact avec la personne qui est venue à son secours et qui l’a aidé à partir pour échapper à l’enfer. J’ai reçu son acte de naissance et son carnet scolaire qui prouvaient qu’il était bien mineur. Nous avons transmis ces documents à la juriste de Caritas qui suivait Emmanuel. La juriste, qui elle aussi ne croyait pas qu’il était mineur, m’a fortement remerciée.

    Trois mois plus tard, Emmanuel m’a appelé. « J’ai une bonne nouvelle, j’ai reçu l’asile et un permis B. » Quelle bonne nouvelle !

    Monsieur Mbuyeh venait d’un village anglophone du Cameroun où l’armée a tué les habitants et brûlé les maisons.

    A ce moment-là, lui ne se trouvait pas au village. En rentrant, monsieur Mbuyeh a trouvé sa famille décimée. (il m’a montré une vieille Bible en disant : « c’est la seule chose qui me reste de mon père »). Il a été arrêté et mis en prison.

    Pendant sa détention, il s’est fait régulièrement violer par un gardien de prison. Ce même gardien qui transportait les détenus pour les exécuter, l’a jeté hors du véhicule, pour qu’il s’enfuit. Le médecin qu’il a vu a l’aéroport de Genève a dit que monsieur Mbuyeh devrait être pris en charge par des spécialistes.

    Pendant le temps où monsieur Mbuyeh séjournait à l’aéroport pour sa première audition, il souffrait beaucoup!

    Chaque rencontre est unique et nous enrichit mutuellement. En écoutant et accompagnant la personne en détresse, je demande la présence de Dieu. Car Jésus nous à dit : « là où il y a des personnes réunies en mon nom, je suis au milieu d’eux. » Je garde la personne rencontrée dans mes prières. Les contacts avec les personnes rencontrées à l’aéroport continuent souvent après leur entrée en Suisse, même avec certains renvoyés dans leur pays.