Étiquette : témoignage personnel

  • Liberté et Amour : Sur le Poème Liberté de Paul Éluard

    Liberté et Amour : Sur le Poème Liberté de Paul Éluard

    `Sur mes cahiers d’écolier/ Sur mon pupitre et les arbres/ Sur le sable sur la neige/ J’écris ton nom…`

    Le poème Liberté de Paul Éluard est bien plus qu’un poème ordinaire pour moi. À différentes étapes de ma vie, j’ai rencontré ce poème dans différentes langues, et à chaque fois, il m’a permis d’y attribuer des significations plus profondes. La première fois que je l’ai découvert, c’était à travers la traduction en turc d’un poète turc. Puis, des années plus tard, en lisant l’original en français, j’ai réalisé que ce poème ne m’avait pas seulement touché par son sens, mais aussi par l’histoire qu’il porte. Au départ, Éluard avait envisagé d’écrire ce poème pour la femme qu’il aimait, et il pensait lui donner le titre Une Seule Pensée. Cependant, avec le temps, la pensée de la liberté a pris une place plus importante dans son esprit et il a changé le titre en Liberté. Peut-être pensait-il que le sens et la valeur de l’amour étaient liés à l’existence de la liberté. Finalement, ce poème est devenu un cri, dédié non seulement à la femme qu’il aimait, mais aussi à la liberté qu’il rêvait d’atteindre.

    `Sur les images dorées/ Sur les armes des guerriers/ Sur la couronne des rois/ J’écris ton nom.`

    Liberté est publié pour la première fois à Londres à la fin de l’année 1941. Puis, en juin 1942, il est à nouveau publié sous le titre Une Seule Pensée dans la revue Fontaine, et la même année, il est apparu dans le journal La France Libre à Londres. Quelques semaines plus tard, le poème, traduit en dix langues, est parachuté en milliers d’exemplaires dans les montagnes de la France occupée par la Royal Air Force. Ainsi, les mots intimes de Liberté sont devenus universels, porteurs d’un message de résistance et d’espoir. L’histoire de ce poème m’affecte profondément à chaque lecture. Car pour moi, la liberté n’est pas simplement un concept, mais l’émotion la plus fondamentale qui façonne ma vie. En tant que personne contrainte de quitter mon pays, je ressens chaque jour la douleur de la perte de la liberté. Le manque de liberté limite également l’attachement de l’individu à ses proches, à ses rêves et à lui-même. C’est pourquoi Liberté n’est pas simplement un poème ; il est le manifeste d’une lutte pour retrouver la dignité humaine, la patrie et la liberté. Ce lien entre la liberté et la dignité humaine se reflète aussi dans l’amour, un autre aspect essentiel de la vie. L’amour, bien sûr, est une chose précieuse. Exprimer par un poème ce que l’on ressent pour la personne que l’on aime est l’un des désirs les plus sincères du coeur. Mais pour que ces désirs prennent tout leur sens, la liberté est l’une des conditions essentielles. Pour vivre votre amour, l’atteindre, partager votre vie avec la personne que vous aimez, vous devez d’abord être un individu libre. Le poème d’Éluard transmet cette idée de manière si puissante en ancrant l’amour dans la liberté que chaque mot du poème touche mon coeur.

    `Et par le pouvoir d’un mot/ Je recommence ma vie/ Je suis né pour te connaître/ Pour te nommer/Liberté.`

    Liberté n’est pas seulement un poème d’amour. C’est une expression du désir humain de liberté, d’identité, d’honneur et de droits de l’homme. Chaque fois que je le lis, je me vois dans ces strophes. C’est pourquoi ce poème signifie bien plus qu’une simple oeuvre pour moi. Liberté est la voix de tous ceux qui connaissent la valeur de la liberté ; c’est le poème de ceux qui se battent pour elle.

  • L’integration est un cheminement

    L’integration est un cheminement

    Je m’appelle Irène Raoelison et je suis originaire de Madagascar, la grande île de l’Océan Indien. Je suis arrivée en Suisse en 2016, dans le canton de Fribourg, pour donner suite à une formation que j’ai suivie en Afrique et en Europe. Je suis retournée quelques mois dans mon pays avant de repartir pour Genève en 2017. L’obtention du visa d’entrée sur le sol helvétique n’était pas facile. J’ai dû faire un recours à la suite d’une réponse négative à ma première demande auprès de l’ambassade suisse à Madagascar. Il me fallait de la résilience et beaucoup de persévérance dans mes démarches. En ce qui concerne la langue, venant d’un pays francophone et ayant appris le français depuis l’enfance, je n’ai pas de difficulté pour la communication. D’ailleurs, j’ai pu poursuivre sereinement mes études universitaires. Il me fallait toutefois m’informer au fil du temps sur la langue et la culture suisses. En effet, même si nous sommes francophones, il existe des différences dans le vocabulaire, le sens et le poids des mots, la vision du monde…

    Il m’arrivait de ne pas comprendre les explications de mes professeurs à l’université lorsqu’ils évoquaient des éléments culturels qui m’échappaient. Je posais alors des questions soit aux professeurs eux-mêmes, soit aux autres étudiants, soit aux personnes de mon entourage. Je lisais beaucoup aussi.

    La bonne curiosité, le courage de poser des questions, le sens du dialogue et de l’échange nous aident à mieux comprendre l’autre. Pour la question de la langue qui facilite les interactions sociales et l’intégration, il existe plusieurs possibilités d’apprentissage du français pour les non francophones à Genève, à travers des structures cantonales et des associations.

    Pour ce qui est de l’intégration professionnelle, pour moi qui suis originaire d’un pays non européen, le défi n’a pas été facile à relever. À la fin de mes études, ce n’était pas évident de trouver tout de suite un travail. D’ailleurs, j’ai dû patienter quelques mois avant d’y arriver. Ma chance a été que j’ai suivi des études dans un domaine assez spécifique et que mon parcours de vie m’a aidé à développer certaines compétences nécessaires dans mon métier actuel. Ce qui est bien à Genève et dans différentes régions de la Suisse, c’est la possibilité pour les personnes, locales et étrangères de bénéficier de conseils, voire de programmes d’insertion professionnelle. Puis, différentes structures comme le pôle emploi à l’université et certaines associations offrent des services d’aide à la recherche d’emploi et des conseils en matière de rédaction de CV et de préparation aux entretiens d’embauche.

    Quant à la vie dans le contexte genevois, là où j’avais besoin de fournir un effort était, entre autres, dans mon rapport au temps. J’ai grandi loin de la ponctualité suisse puisque je viens du pays du « moramora » (avançons tranquillement) où le temps nous appartient, nous avons le temps. Il me fallait trouver les moyens, comme le réveil le matin ou même le long de la journée pour mieux respecter la culture de la ponctualité et précision helvétique. Un autre défi que j’ai dû surmonter concerne la compréhension de certains systèmes comme le système d’assurance. Je n’avais pas cette culture des assurances aux primes élevées dans mon pays. C’est à travers une amie jurassienne que j’ai mieux capté et compris la logique de solidarité qu’on peut trouver dans le système d’assurance helvétique. Un autre élément que j’ai appris au fil du temps est l’importance de ne pas faire des comparaisons. Je ne peux pas comparer les réalités que je trouve ici avec celles qui existent dans mon pays d’origine.

    Certes, je garde aussi le lien avec Madagascar à travers ma famille et mes amis qui me partagent les nouvelles du pays. Je garde également mes manières d’être malgache, j’écoute la musique du pays, je continue à manger du riz tout en appréciant la gastronomie, la cuisine d’ici… J’ai rejoint un groupe de la diaspora de mon île natale avec laquelle il me semble souvent de me retrouver en famille. Même si les ressortissants de Madagascar ne sont pas si nombreux en Suisse, j’étais vraiment contente de trouver ce groupe et de passer des moments avec eux quand je peux. Entre temps, j’ai trouvé une communauté suisse avec laquelle je continue à grandir sur mon chemin de foi, un aspect important pour moi. Puis je participe autant que possible aux différentes activités sociales et culturelles de la ville de Genève qui me permettent à la fois de connaître les réalités de la population d’ici et d’élargir le cercle d’amis. Des conférences aux rencontres culturelles et festivals, de l’escalade à la fête nationale, sans oublier les activités de solidarité comme le samedi du partage.

    Au-delà d’un climat qui semble parfois être froid, j’ai toujours apprécié l’esprit d’entraide et de solidarité à Genève ainsi que la forte diversité culturelle trouvée ici qui élargit le coeur et l’esprit. A travers les initiatives de ses citoyens, j’ai découvert Genève en tant que ville prônant l’inclusion et la diversité par différents moyens. J’ai remarqué qu’il existe de nombreuses structures offrant un accueil chaleureux aux nouveaux venus, quel que soit leur statut. Bien évidemment, l’intégration peut aussi dépendre des liens sociaux que chacun parvient à tisser avec la population et c’est pour cela que j’encourage la participation aux différents événements. Dans le quotidien, il y a toujours des défis à relever, mais il existe également une multitude de ressources et de possibilités pour faciliter l’intégration dans cette ville de la paix et de la fraternité.